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Tuna War Games, BLOOM fait appel contre l’UE et la France

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Alors que les membres de la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI) sont réunis à Maurice depuis lundi pour leur réunion annuelle, les enjeux politiques pour la protection des écosystèmes marins n’ont jamais été aussi élevés, alors que les lobbies thoniers européens et leurs alliés politiques sapent tout impact environnemental. progrès dans la région. BLOOM dépose aujourd’hui deux recours auprès de la Commission Européenne et de la Direction Générale des Affaires Maritimes, de la Pêche et de l’Aquaculture (DGAMPA), suite aux objections déposées par ces deux institutions contre la décision prise en février dernier par la CTOI d’interdire partiellement le ‘Fish Aggregation’ (DCP) — une méthode de pêche très destructrice — pendant une partie de l’année. Ces objections inacceptables sont en totale contradiction avec les principes de la Politique Commune de la Pêche et ne vont qu’alimenter le ressentiment anti-européen dans la région ainsi que le désespoir de la société civile, atterrée par la volonté de l’UE d’agir contre l’intérêt général de la seul profit d’une poignée d’industriels français et espagnols.

Le 5 février 2023, les pays côtiers ont réalisé un véritable tour de force, en obtenant (par 16 voix contre 23) une première interdiction annuelle des DCP dans l’océan Indien. Cette interdiction temporaire est appliquée dans tous les autres océans par mesure de conservation et par principe de précaution. Les DCP sont largement considérés comme une menace sérieuse pour les écosystèmes marins du monde entier. Même les représentants de l’industrie reconnaissent ouvertement que les DCP ont un impact catastrophiquecomme en témoigne Adrien de Chomereau, PDG de Sapmer — l’une des trois entreprises françaises qui ciblent le thon tropical — qui a déclaré que «le moins de DCP possible est le chemin de la vertu.” (1)

Une résolution rendue inefficace et peut-être bientôt annulée

Malgré cette décision démocratique prise par les membres de la CTOI en février 2023 — qui représentait un premier pas très concret vers la reconstitution des populations de thons surexploités dans l’océan Indien et la protection des écosystèmes marins fragiles — la Commission européenne a choisi de s’aligner sur les intérêts d’une poignée d’entreprises thonières françaises et espagnoles. L’institution a ainsi plaidé pour une objection à cette résolution essentielle, utilisant une série de faux arguments que nous avions déjà réfutés dans un précédent rapport. (2) Le 11 avril 2023, la Commission européenne a formellement déposé son objection auprès du secrétariat de la CTOI, (3) et trois jours plus tard, la France — qui bénéficie d’un siège supplémentaire à la CTOI grâce à ses « Iles Éparses » (quelques petites îles inhabitées du canal du Mozambique) — a déposé une objection similaire. (4)

Ce faisant, la grande majorité des navires utilisant ces engins létaux dans l’océan Indien sont désormais hors du champ d’application de la résolution de la CTOI, étant donné que sous la gouvernance de la CTOI, les résolutions ne s’appliquent pas aux membres objectant. Les Seychelles et Oman se sont également opposés, de sorte que la résolution ne s’applique désormais qu’à cinq des 47 navires français et espagnols opérant dans l’océan Indien. (5) Si Maurice mettait également à exécution sa menace d’objection, un seul navire resterait affecté.

Remèdes nécessaires pour protéger les écosystèmes marins

Face à l’omnipotence des lobbies industriels et de leurs relais politiques au sein de la Commission européenne et du Conseil de l’UE, BLOOM se tourne à nouveau vers la justice, devenue quasiment le seul rempart des associations citoyennes et écologistes contre les arbitrages qui mettent en danger, l’un après l’autre, l’équilibre de la biosphère.

A travers les deux recours déposés par BLOOM, nous demandons à la Commission européenne et à la France (6) de reconsidérer leurs décisions et de retirer leurs objections à la nécessaire interdiction des DCP 72 jours par an.

En défendant par tous les moyens, y compris par des méthodes antidémocratiques, une poignée d’industriels engagés dans une pêche très controversée et destructrice, l’UE joue un jeu dangereux dans l’océan Indien et alimente un profond ressentiment anti-européen dont les ramifications iraient bien au-delà de la simple question de pêche. Utiliser l’aide au développement comme monnaie d’échange pour obtenir l’abaissement des exigences écologiques des pays du Sud est notamment un acte dévastateur pour la confiance Nord-Sud et laisse peu d’espoir aux populations de part et d’autre des continents européen et africain sur la capacité des politiciens à prendre les décisions justes et courageuses qui s’imposent à une époque d’effondrement de la biodiversité et du climat. Si les flottes industrielles européennes se comportent avec une brutalité écologique et néocoloniale aussi flagrante, comment espérer améliorer les pratiques d’autres nations de pêche lointaine, comme la Chine, la Corée, la Russie ou la Turquie ?

Les actions récentes de l’UE et de la France ont brisé le mythe de l’exemplarité des flottes industrielles que la Commission européenne voudrait installer. Nous comptons désormais sur la procédure engagée par ce premier acte pour contraindre l’UE à se comporter de manière transparente et digne.

LES RÉFÉRENCES

(1) https://lemarinblog.wordpress.com/2016/09/22/la-reunion-les-voyants-sont-au-vert/.

(2) https://bloomassociation.org/wp-content/uploads/2023/04/Lining-up-the-ducks_FR.pdf.

(3) Disponible ici : https://iotc.org/sites/default/files/documents/2023/04/Circular_2023-26_-_Communication_from_the_European_UnionE.pdf.

(4) https://iotc.org/sites/default/files/documents/2023/04/Circular_2023-28_-_Communication_from_FranceOTE.pdf.

(5) 13 navires français et 15 espagnols, plus trois navires français immatriculés à Maurice et 16 navires espagnols immatriculés aux Seychelles (13), à Maurice (1), en Tanzanie (1) et à Oman (1).

(6) Direction générale française des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture (DGAMPA).

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