Les ministres de l’Intérieur et du Travail ont dévoilé les contours de ce texte dont l’examen est prévu début 2023.
Publié le 02/11/2022 11: Mis à jour le 03/11/2022 à 03h09
Le gouvernement vante « un véritable équilibre » sur son futur projet de loi sur l’immigration. Gérald Darmanin et Olivier Dussopt ont dévoilé, mercredi 2 novembre, les grandes lignes de ce texte qui doit être examiné début 2023. Dans un entretien au Monde (article pour les abonnés), les ministres de l’Intérieur et du Travail défendent un durcissement sur les expulsions et des mesures pour l’insertion des travailleurs immigrés. « On doit désormais être méchants avec les méchants et gentils avec les gentils », déclare Gérald Darmanin pour résumer la philosophie du projet. Franceinfo en détaille les contours.
Créer un titre de séjour « métiers en tension »
Pour recruter dans les secteurs en pénurie de main d’œuvre, le gouvernement plaide pour la création d’un titre de séjour « métiers en tension ». « Les organisations professionnelles nous disent qu’elles ont besoin qu’on facilite le recrutement d’étrangers. Nous leur proposons des solutions avec ce projet de loi », estime le ministre du Travail. « Ce titre de séjour spécifique sera là pour régulariser une situation parce qu’on démontre qu’on travaille dans un métier en tension », a détaillé Olivier Dussopt, citant notamment l’exemple de la filière du bâtiment.
Afin de favoriser l’insertion professionnelle, le gouvernement évoque par ailleurs la « possibilité » de mettre fin, sous certaines conditions, au délai de carence qui empêche les demandeurs d’asile de travailler pendant leurs six premiers mois en France. Il ouvre également la porte à une réforme réclamée de longue date par les syndicats : permettre à un travailleur en situation irrégulière de demander lui-même sa régularisation, « sans passer par l’employeur », qui peut « trouver un intérêt » à le maintenir dans la clandestinité, selon Olivier Dussopt.
Améliorer l’exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF)
Cette future loi sur l’asile et l’immigration doit aussi introduire une série de mesures pour rendre les obligations de quitter le territoire français (OQTF) plus efficaces. Un sujet qui anime le débat public depuis le meurtre de la jeune Lola, dont la principale suspecte était sous le coup d’une OQTF. « Il y a près de 50% des OQTF qui font l’objet de recours qui les suspendent », avance Gérald Darmanin, qui réaffirme sa volonté de « fortement simplifier les procédures » en passant « de douze à quatre catégories de recours » possibles.
Par ailleurs, le ministre de l’Intérieur demande aux préfectures de réaliser un suivi de toutes les personnes visées par une OQTF, soulignant qu’aujourd’hui « le suivi n’existe que pour les personnes dangereuses ». « Le préfet veillera à leur rendre la vie impossible, par exemple en s’assurant qu’elles ne bénéficient plus de prestations sociales ni de logement social », ajoute-t-il. Le ministre de l’Intérieur veut aussi mettre fin aux « réserves d’ordre public » qui « empêchent d’éloigner des personnes arrivées avant 13 ans » en France.
Inscrire les immigrés visés par une OQTF au « fichier des personnes recherchées »
En parallèle, le gouvernement souhaite inscrire les immigrés visés par une OQTF au « fichier des personnes recherchées » (FPR). Gérald Darmanin juge que cette mesure permettra de mieux rendre compte de l’application des OQTF. « Il ne s’agit pas de rétablir le délit de séjour irrégulier mais de pouvoir constater que la personne repart comme lorsque, par exemple, elle reprend un avion, et ainsi de compter tous les départs d’étrangers », défend-il.
Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, avant la crise sanitaire, la France a délivré environ 122 000 OQTF en 2019, mais n’en a exécuté qu’environ 12%. « Pour calculer le taux d’exécution, on ne compte que les départs aidés et les départs forcés, soit près de 17 000 éloignements en 2021″, argumente le ministre. « Or, des milliers de personnes quittent le territoire après avoir reçu une OQTF, sans qu’on le sache », assure-t-il.
Conditionner les titres pluriannuels à la réussite d’un examen de français
Selon Gérald Darmanin, « un quart des étrangers qui ont des titres de séjour comprennent et parlent extrêmement mal le français ». L’exécutif entend donc conditionner la remise d’un titre de séjour pluriannuel à la réussite d’un examen de français.
Sur ce volet, le gouvernement veut également « proposer le renouvellement automatique des titres pluriannuels » à ceux « qui n’ont aucun casier judiciaire ». « Cela représente quelques centaines de milliers de personnes qui seront dispensées de files d’attente dans les préfectures », affirme le ministre de l’Intérieur.
Accélérer le traitement des demandes d’asile
Enfin, le projet de loi comportera plusieurs réformes en matière d’asile. Le rejet d’une demande d’asile en première instance par l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) « vaudra OQTF avec possibilité de recours sous quinze jours », annonce Gérald Darmanin.
Pour accélérer l’examen des recours formés par les demandeurs d’asile contre les décisions de l’Ofpra, le gouvernement plaide pour une généralisation du juge unique à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). Une formation collégiale ne se réunira plus que pour « des cas très difficiles », ajoute le ministre de l’Intérieur. Enfin, la possibilité d’organiser des audiences en visioconférence sera « généralisée ».
source AFP